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Fête du Travail : Les syndicats rejettent les propositions du gouvernement

 Après le rejet des centrales syndicales les plus représentatives de l’offre présentée par le gouvernement à la veille du 1er mai 2018, la qualifiant « d’insignifiante et de discriminatoire », les prémices d’une tension se profilent à l’horizon, laissant la porte ouverte à toutes les hypothèses sur le sort du dialogue social dans une conjoncture marquée par la recrudescence des manifestations sociales. 

Au moment où le gouvernement a fait part de sa volonté de réussir le dialogue social par la signature d’un accord tripartite et de garder le dialogue ouvert avec les syndicats, ces derniers ont considéré l’offre gouvernementale de valoriser les salaires dans la fonction publique et les collectivités locales comme « décevante, arbitraire et discriminatoire, estimant qu’elle ne rend pas justice à la classe ouvrière et est de nature à maintenir le blocage ».

Même si le gouvernement actuel a opté, depuis son investiture, pour une politique de dialogue avec les différentes centrales syndicales en vue de trouver des solutions aux différents dossiers en suspens, les syndicats ont exprimé leur inquiétude quant à l’échec du dialogue en raison des « offres ambiguës du gouvernement », notamment à propos de la mise en œuvre de ce qui reste de l’accord d’avril 2011, la discussion de nouveau des projets à caractère social soumis au parlement et le respect des libertés syndicales. A cet égard, le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement et la société civile, porte-parole du gouvernement, Mustapha El Khalfi avait déclaré, lors du point de presse à l’issue de la réunion hebdomadaire du Conseil du gouvernement, que l’offre du gouvernement comprend une batterie de mesures importantes, dont une partie concerne l’augmentation des salaires des fonctionnaires dans les échelons de 1 à 5 de l’échelle 10, notant que cette mesure, dont le coût s’élève à près de 4 MMDH, contribuera à améliorer le revenu de plus de 700.000 fonctionnaires, dont 120.000 au niveau des collectivités territoriales.

L’autre mesure, a-t-il poursuivi, porte sur l’augmentation des allocations familiales au profit de quelque 380.000 fonctionnaires, hormis les salariés des collectivités territoriales et des établissements publics, pour une enveloppe de près de 1 MMDH.

Le ministre a fait état d’autres mesures relatives entre autre à la création d’une nouvelle catégorie pour les fonctionnaires classés dans les échelles inférieures et l’application de l’indemnité de travail dans les zones éloignées.

Par ailleurs, M. El Khlafi a indiqué que le dialogue social avec les syndicats se poursuit, exprimant le souhait du gouvernement de parvenir à un accord qui serait un pas important sur la voie de l’amélioration du revenu, du pouvoir d’achat et la lutte contre les disparités au niveau des revenus.

Dans ce cadre, il a indiqué que le gouvernement tient à la réussite du dialogue social et à la signature de l’accord tripartite et que cet accord ait un impact positif sur l’amélioration du revenu, de la capacité d’achat du citoyen et la lutte contre les disparités.

« Ce que nous voulons et ce à quoi nous aspirons est de réussir le dialogue social et de signer l’accord tripartite », a insisté le ministre, relevant que cela sera un pas gagnant à la fois pour la classe ouvrière et pour les fonctionnaires.

Evoquant les revendications des syndicats, le ministre a indiqué que chaque revendication fait l’objet de discussions sur la table de négociation dans le cadre du dialogue social, relevant que chaque partie exprime sa position.

A cet effet, M. El Khalfi a rappelé que le gouvernement et les syndicats avaient convenu de mener le dialogue social en deux étapes et que les rencontres et le dialogue avec les syndicats demeurent ouverts.

Réagissant à l’offre gouvernementale, le secrétaire général de l’Union marocaine du Travail (UMT), Miloudi Moukharik, a indiqué qu’ »au moment où nous attendions du chef du gouvernement des propositions qui rendent justice aux droits des ouvriers et mettent fin au blocage, des décisions arbitraires et discriminatoires ont vu le jour », estimant que « l’augmentation des salaires des fonctionnaires annoncée par le gouvernement reste insignifiante et en deçà des aspirations des travailleurs, d’autant plus qu’elle exclut les salariés relevant du secteur privé et les fonctionnaires classés à l’échelle 11, outre ceux qui travaillent dans certains établissements publics ».

Dans une déclaration à la presse, M. Moukharik a rappelé que les syndicats et le gouvernement avaient convenu une augmentation nette de 300 DH qui entrera en vigueur à compter de la date de la signature de l’accord, se disant surpris que cette augmentation soit étalée sur une période de 3 ans, soit 100 dirhams par mois à partir du 1er janvier 2019.

M. Moukharik a appelé le gouvernement à respecter les libertés syndicales, à retirer le projet de loi organique sur la grève et à régler les dossiers des catégories affectées par les lois organiques précédentes, proposant de faire du 1er mai de cette année, une journée de protestation contre les politiques gouvernementales dans le domaine social et qui visent « à saper les acquis et les droits et à appauvrir la classe ouvrière ».

Pour sa part, Mohamed Alami, l’un des dirigeants de la Confédération démocratique du travail (CDT), a critiqué l’action du gouvernement et son incapacité à gérer la conjoncture nationale nécessitant la création d’un climat qui favorise le dialogue à travers la promotion de la cohésion sociale et de la solidarité nationale et l’augmentation des salaires.

L’Union nationale du travail au Maroc (UNTM) a, pour sa part, plaidé pour l’institutionnalisation du dialogue social en mettant en place une loi cadre de nature à favoriser des négociations collectives réelles et productives et l’harmonisation de la législation marocaine avec les conventions internationales issues de l’Organisation internationale du Travail, outre l’abrogation de l’article 288 du code pénal et l’annulation de l’article 5 relatif à l’exercice du droit syndical dans la fonction publique.

La centrale syndicale a notamment appelé à des augmentations salariales, l’amélioration des revenus des retraités, la réduction des disparités entre les salaires, l’instauration d’un salaire minimum interprofessionnel garanti (SMIG) répondant aux exigences fondamentales de la dignité humaine et la réforme du régime fiscale et celui d’avancement.

Pour sa part, l’Union générale des travailleurs au Maroc (UGTM) a insisté sur l’amélioration du revenu des salariés dans les secteurs public et privé et ce par l’augmentation du SMIG de tous les travailleurs de manière à ce qu’il correspond au pouvoir d’achat des familles.

De même, l’UGTM a plaidé pour l’augmentation du seuil d’exonération d’impôt sur le revenu et la baisse des charges de la scolarité, des soins médicaux, du transport et taux d’intérêt sur les crédits, ainsi que la protection des couches sociales moyennes contre les mesures gouvernementales qui leur ciblent.

L’Union a également mis l’accent sur le respect des libertés syndicales et le retrait immédiat du projet de la loi interdisant les manifestations, la généralisation de la couverture sociale et de santé sur l’ensemble des salariés, le renforcement des organes du contrôle, l’application des mesures répressives à l’égard des employeurs entravant la législation sociale et ceux qui ne déclarent pas leurs salariés à la Caisse Nationale de sécurité sociale (CNSS), ainsi que la généralisation des œuvres sociales aux différents secteurs.

A la même occasion, l’UGTM a appelé à accélérer d’adoption de la convention 87 de l’Organisation internationale du travail (UIT), et à annuler l’article 288 du code pénal, outre la mise à jour de la loi sur l’indemnité pour perte d’emploi.

Quant au professeur de droit constitutionnel à la Faculté de Mohammedia, Said Khomri, il a souligné dans une déclaration à la MAP, que l’offre gouvernementale « ne répond pas aux revendications de la classe ouvrière marocaine et n’aurait aucun impact sur le revenu du salarié et du fonctionnaire ».

Il a, qualifié l’offre de « sélective » dans la mesure où elle ne concerne pas toutes les catégories des fonctionnaires, particulièrement ceux classés dans l’échelle 11 et qui constituent une partie importante de la classe moyenne.

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