Affaire Sansal: L’Algérie muselle les voix critiques sous couvert de « unité nationale »

La confirmation du verdict rendu contre l’écrivain Boualem Sansal révèle le mode de fonctionnement du système judiciaire algérien face aux affaires d’opinion qui remettent en cause les récits officiels de l’État. Les procédures judiciaires, à travers l’invocation de dispositions vagues comme l’« atteinte à l’unité nationale », se transforment ainsi en un instrument de contrôle de l’espace public.
Selon des observateurs, cette affaire ne concerne pas tant le contenu des déclarations de Sansal qu’un message de dissuasion adressé aux élites culturelles et intellectuelles, visant à asseoir le principe de non-franchissement des lignes rouges tracées par le pouvoir militaire algérien.
Dans ce contexte, Abdelouahab El-Kain, coordinateur adjoint de la Coalition des ONG sahraouies, a considéré dans une déclaration exclusive au journal « Al Omk » que l’arrestation d’un écrivain octogénaire n’est pas surprenante, compte tenu de « l’histoire du régime politique, entachée de violations systématiques contre toute voix susceptible de produire une pensée ou une opinion dissidente ».
El-Kain a qualifié l’arrestation de Sansal à son arrivée à l’aéroport Houari Boumediene d’« arrestation arbitraire qui incarne la fébrilité d’un pouvoir qui craint la force de la plume », soulignant que la défense de la liberté d’opinion est un principe indivisible, même en cas de désaccord avec les opinions de l’écrivain.
Dans sa déclaration, El-Kain a souligné que la thèse de Sansal sur « le détachement de territoires marocains par le colonisateur français pour les rattacher à l’Algérie » aurait pu être un « signal d’alarme pour se réconcilier avec soi-même et réécrire l’Histoire ».
Il a affirmé que sa condamnation à cinq ans de prison ferme n’est pas une victoire pour la sécurité nationale, mais plutôt « la preuve d’une déliquescence morale et institutionnelle avancée des institutions de l’État », de l’absence des conditions d’un procès équitable et du mépris des engagements internationaux de l’Algérie.
L’intervenant s’est interrogé sur la schizophrénie du comportement des autorités algériennes, qui jugent un écrivain pour son opinion historique, tout en produisant, via leurs médias officiels, des allégations « sans aucun lien avec la réalité concernant de prétendues violations dans les provinces du sud du Royaume du Maroc ».
Il a noté que le contenu médiatique dirigé contre le Maroc ne trouve le chemin de la publication que s’il s’acharne à « dénaturer les faits et à nier les réalisations et l’essor économique que connaît le Sahara marocain ».
Abdelouahab El-Kain a conclu que le silence international suspect autour de l’affaire Sansal révèle une politique de « deux poids, deux mesures ». Il a comparé l’attention intense portée à des affaires d’opinion au Maroc à la complaisance face à des violations graves lorsque l’Algérie est impliquée, comme « le meurtre de militants sahraouis dans les camps de Tindouf, la disparition forcée de Khalil Ahmed Bireh, ou l’arrestation de journalistes et d’écrivains ».
L’intervenant a appelé à la nécessité de définir clairement les lignes rouges des concepts de sécurité nationale et d’ordre public, afin que d’autres victimes ne finissent pas emprisonnées.
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