Culture

Cinq questions aux réalisateurs Belgo-Marocains Adil El Arbi et Bilall Fallah

A l’occasion de la sortie de leur film « Rebel », les réalisateurs Belgo-Marocains Adil El Arbi et Bilall Fallah accordent à la MAP un entretien dans lequel ils braquent les projecteurs sur cette « nouvelle expérience », ainsi que sur les plus grands défis auxquels ils ont fait face pour la réussite de ce long métrage qui s’attaque au sujet du terrorisme et ses effets dévastateurs.

Connus notamment pour avoir conquis Hollywood par la mise en scène du blockbuster « Bad Boys For Life » avec à l’affiche les stars Will Smith et Martin Lawrence, Adil et Bilall reviennent également sur la place du « rap » et de la poésie arabe dans le film « Rebel ».

1- Il s’agit de votre première expérience de production d’un film de guerre. Parlez-nous de cette aventure et des plus grands défis !

« Rebel » est effectivement notre première expérience en matière de production de film de guerre. Cependant, l’expérience hollywoodienne que nous avions acquise, que ce soit à travers la série « Snowfall », « Mrs Marvell » ou « Bad boys for life », nous a offert un savoir-faire en matière de réalisation de grosses scènes d’action, même en présence d’un budget assez limité.

L’armée jordanienne, ainsi qu’un membre de forces spéciales belges ayant participé à combattre « daesh » en Irak, nous ont beaucoup aidé dans la construction des scènes qu’on a dû répéter plusieurs fois pour qu’elles soient encore plus authentiques et réalistes d’un point de vue tactique militaire.

Notre plus grand défi était principalement de réussir à mettre en place des scènes de guerre spectaculaires et réalistes avec un budget restreint.

2- Comment avez-vous réussi à transmettre de manière très réaliste ce qui se passe aux territoires contrôlés par l’État islamique (EI) ?

Nous avons fait beaucoup de recherches, consulté beaucoup de documentaires et d’images d’archives, analysé beaucoup de vidéos de propagande de « daesh » et parlé aux personnes qui ont été présentes aux territoires contrôlés par l’EI et à leurs familles, pour avoir une idée plus claire de ce qui se passait.

Nous avons également interviewé des réfugiés syriens et irakiens en Jordanie ayant fui la dictature de « daesh ». Ces gens ont participé au film en tant que figurants et ils nous ont raconté toutes leurs histoires.

3- Le film aborde une problématique très sensible, à savoir le terrorisme. Est ce que cela vous a posé des problèmes lors du choix des acteurs et du financement du projet ?

Quoiqu’il s’agit d’un projet assez sensible, le succès de nos films précédents nous a offert une certaine crédibilité qui nous a permis de bénéficier d’un grand soutien de la part des acteurs, ainsi que sur le plan du financement.

Les acteurs ont vu qu’il s’agit d’une histoire « personnelle » qui mérite d’être racontée, au regard notamment de la rareté des productions cinématographiques d’origine marocaine et musulmane qui traitent ce sujet.

Il était donc important pour nous de faire ce film et de montrer que les musulmans ne sont pas des terroristes et qu’ils représentent plutôt la première victime du terrorisme.

4- Le film est aussi une tragédie musicale ponctué des scènes de rap et d’extraits de poésie arabe. Pourquoi ce choix?

En tant que Marocains en Belgique, nous avons grandi dans une culture arabo-musulmane magnifique et très poétique. Notre objectif était ainsi de raconter cette histoire assez complexe dans un style de mille et une nuit, sous forme de contes arabes modernes, tout en faisant appelle à notre « Sherazade » qui raconte l’histoire avec cette poésie.

Et comme « daesh » est contre la musique, le chant et la danse, il nous a semblé encore plus approprié de mettre en place une tragédie musicale pour dresser ce film qui dénonce les pratiques de ce groupe terroriste, tout en utilisant le rap, qui relève de la culture du quartier, et le chant arabe.

L’usage de la musique nous a permis, en outre, de raconter beaucoup de choses dans un laps de temps réduit.

5- Vous avez contribué au rayonnement du Maroc à l’échelle internationale. Quel est le secret de votre réussite et quel est le message que vous pouvez transmettre aux jeunes à cet égard?

Tout en se considérant plus comme des étudiants au cinéma que des réalisateurs, notre but est d’essayer de pousser les limites et d’apprendre davantage.

Nous regardons les films un peu comme les gens normaux, nous aimons observer des scènes, analyser des séquences et se demander comment elles ont été réalisées.

Quand il s’agit de la réalisation de nos propres films, nous essayons de mettre en pratique ce que nous avions appris à partir de l’observation des films que nous apprécions, à l’instar des films d’Oliver Stone, de Spielberg et de Jacques Audiard, tout en nous remettant toujours en question.

Nous admettons qu’il n’est pas possible de faire le film parfait et que nous faisons toujours des erreurs. L’essentiel est d’apprendre de ces erreurs et de continuer à être étudiant.

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