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Portugal : vers une légalisation de l’euthanasie ?

Le Président portugais, Marcelo Rebelo de Sousa, a annoncé le 4 janvier avoir saisi la Cour constitutionnelle pour qu’elle analyse la loi autorisant l’euthanasie votée début décembre par la majorité de gauche au Parlement. Dernier épisode d’une longue bataille législative qui divise la classe politique.

La plus haute instance judiciaire du pays devra ainsi se prononcer sur la nouvelle version d’un texte qu’elle avait retoqué en mars 2021, jugeant que la loi encadrant la «mort médicalement assistée» employait des termes trop imprécis. Une justification qui ne rejetait pas catégoriquement le principe, d’où la naissance d’une nouvelle tentative. Et depuis, la question suscite une vive polémique dans le pays.

Si le parti socialiste et nombre d’ONG, à leur tête Dignitas, soutiennent le « droit à la mort dans la dignité », d’autres acteurs politiques et religieux s’y opposent fortement.

Le débat remonte à 2018. Une première proposition de loi visant à dépénaliser l’euthanasie a été rejetée in extremis par l’Assemblée de la République, dont la majorité était détenue par le Parti social démocratique, qui continue de crier aujourd’hui son refus à travers l’opposition. Une position partagée par l’Eglise portugaise et d’autres associations à caractère religieux, qui ne cessent d’appeler le chef de l’Etat à bloquer ce texte « inconstitutionnel » portant atteinte au droit à la vie.

« L’Église continuera à défendre la dignité de la vie humaine sans recourir à la mort », a affirmé récemment le président de la Conférence épiscopale portugaise (CEP), José Ornelas, appelant les hautes autorités à se mobiliser face à ce texte.

« Le processus législatif n’étant pas conclu, nous avons de l’espoir quant à sa non-approbation », a déclaré, pour sa part, le secrétaire de l’institution épiscopale Manuel Barbosa.

Réitérant que « l’Eglise est toujours contre ces situations d’euthanasie et de suicide assisté » et « est toujours à la défense de la vie et de sa dignité », le porte-parole a souligné que, dans les conditions actuelles, le référendum devait avoir lieu. Une idée que l’Eglise avait dénoncé en 2018.

Le CEP milite « en phase avec les autres institutions catholiques, civiles et autres religieuses, parce que l’euthanasie et le suicide assisté est une question d’humanité, de civilisation et non pas une question religieuse », relève-t-il.

Le 15 mars 2021, le verdict de la plus haute instance judiciaire du pays tombe : par sept voix contre cinq, les juges décident de censurer le projet de loi contre l’euthanasie. Le Parlement aurait pu modifier le texte, mais la dissolution de la chambre des députés en vue des élections législatives de janvier 2022 a bloqué le processus législatif. La nouvelle majorité socialiste issue du scrutin ne renonce pas pour autant. L’Assemblée de la République propose une énième version.

Cette ultime tentative sera-t-elle la bonne ? Si le projet est considéré comme anticonstitutionnel, il sera renvoyé au Parlement qui devra le reformuler. Dans le cas contraire, le chef de l’État peut tout de même y mettre son veto. Le Portugal deviendra-t-il bientôt le cinquième pays européen à légaliser l’euthanasie, après les Pays-Bas en 2001, la Belgique en 2002, le Luxembourg en 2009, et l’Espagne en juin 2021 ? Rien n’est encore tranché.

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