Le Maroc entre dans l’arène de l’industrie militaire : des experts exposent les défis et confirment l’importance des revenus

Le Royaume du Maroc connaît un tournant dans sa trajectoire vers le renforcement de ses capacités défensives en entrant effectivement dans le monde de la fabrication d’armes et de munitions. Le décret numéro 2.23.925, instituant deux zones d’accélération industrielle défensive, marque le début d’une nouvelle étape visant à développer une industrie locale avancée dans ce domaine vital.
Cette décision historique intervient après l’approbation du projet de décret par le Conseil ministériel, présidé par le roi Mohammed VI, et le Conseil gouvernemental. Selon les experts, cette étape constitue une réalisation importante contribuant à renforcer l’autonomie défensive du royaume et à réduire sa dépendance vis-à-vis des sources externes pour ses besoins en armes et munitions.
Le financement, principal obstacle
Dans ce contexte, l’analyste économique, Badr Zaher Al Azrak, a expliqué que la vision de l’État dans le domaine des industries de défense est claire, surtout que cela a été exprimé à travers la nouvelle charte d’investissement, les orientations stratégiques et les accords que le Maroc a signés avec plusieurs acteurs du domaine et des pays spécialisés dans la fabrication d’armes.
L’expert a souligné que la question actuelle concerne le type d’industries vers lesquelles le royaume se dirigera, qu’il s’agisse d’industries lourdes ou de nouvelles industries de défense telles que la fabrication de drones, les industries liées à la guerre électronique, l’espionnage et les satellites, entre autres. Jusqu’à présent, le Maroc n’a pas révélé le type d’armes qui seront fabriquées dans le pays.
Al Azrak a souligné que ce type d’industries fait face à plusieurs difficultés, notamment le financement. Ces investissements nécessitent des financements conséquents, et la réflexion à ce sujet se fait au niveau du gouvernement marocain qui, jusqu’à présent, a présenté une vision des divers partenariats possibles dans ce domaine.
L’expert a ajouté que le Maroc ne peut pas compter uniquement sur les acteurs publics et privés marocains, mais a besoin de financements externes, étant donné que le royaume pourrait devenir une plateforme d’exportation vers l’Afrique et l’Amérique latine, avec lesquelles il entretient des relations commerciales directes.
Reproduire l’expérience de l’industrie automobile
Al Azrak a noté que le secteur est encore à ses débuts, ce qui nécessite des années pour former une nouvelle génération de techniciens, ingénieurs et ouvriers dans ce domaine, ce qui pourrait ralentir le rythme de mise en œuvre de ce projet.
L’analyste économique a considéré que ce projet nécessite la localisation de la technologie liée au domaine militaire, surtout que nous n’avons pas de recherche scientifique avancée spécialisée dans les armes, et par conséquent, nous avons besoin d’importer la technologie de l’étranger, ce qui se fera à travers de nombreuses entreprises qui localisent cette technologie au Maroc et travaillent à en transférer une partie au royaume.
Badr Zaher Al Azrak a expliqué que le Maroc pourrait reproduire l’expérience de l’industrie automobile au Maroc, c’est-à-dire qu’après une ou deux décennies, cette technologie pourrait devenir 100% marocaine à condition de lier les universités, les laboratoires et la recherche scientifique du pays au domaine de la fabrication d’armes.
Le contexte international
De son côté, l’expert en stratégie, Hicham Mouatadid, a souligné qu’il existe plusieurs difficultés naturelles auxquelles fait face tout pays qui cherche à établir des zones militaires, car cela pourrait contrôler la vision stratégique de la mise en œuvre de cet atelier sensible, en plus des dimensions externes liées au contexte international et aux fluctuations géopolitiques qui pourraient avoir un impact direct ou indirect sur la construction de ce type de projets importants.
Le conférencier a ajouté que garantir les ressources financières tout au long de la phase de construction et veiller à l’activation de tous les accords internationaux et à leur mise en œuvre avec tous les partenaires étrangers investissant dans cet atelier stratégique sont parmi les défis les plus importants.
Il a poursuivi : “Le climat du contexte politique international pourrait évoluer de manière à entraver la chaîne d’approvisionnement nécessaire pour lancer les deux zones militaires, nécessitant beaucoup de rigueur politique et de gestion pragmatique pour garantir l’établissement des premiers piliers de ce projet militaire”.
L’expert politique a indiqué que le Maroc possède de nombreux atouts liés principalement aux ressources humaines, surtout que le Maroc a fait de grands progrès dans la construction de compétences professionnelles de haute qualité capables de mettre en œuvre cet atelier stratégique et de le encadrer pour le positionner rapidement sur la carte régionale et continentale en matière de compétitivité militaire et d’équilibres de sécurité nationale.
Coût marginal
Mouatadid a considéré que la maturité politique du Maroc dans la qualification du secteur militaire contribuera grandement à réussir cette orientation stratégique, surtout qu’il adopte une politique de diversification des entreprises partenaires internationales et de promotion de ses institutions militaires pour étendre leurs liens avec différentes écoles mondiales.
L’analyste politique a confirmé que la crédibilité dont jouissent les différentes institutions de défense marocaines auprès des partenaires internationaux, en plus de la présence militaire internationale du Maroc sur la carte de la défense mondiale, sont tous des facteurs qui qualifient Rabat pour construire cet atelier industriel militaire sur des bases répondant aux aspirations de son leadership politique et militaire.
Le conférencier a insisté sur le fait que le coût de la transition vers les industries de guerre, quel qu’il soit, restera marginal au regard du retour sur cet investissement sur le plan politique, militaire, sécuritaire et même économique.
L’expert a enregistré que l’ouverture de cet atelier ne restera pas confinée aux calculs militaires et sécuritaires seulement, mais que le Maroc entrera par la porte de l’économie militaire, ce qui aura des répercussions sur le système social de manière directe ou indirecte.
En conclusion, l’expert en stratégie Hicham Muattad a déclaré : “Le coût peut être exorbitant si placé dans son contexte immédiat, mais en revenant à l’équation de ‘relativité politique’ dans la lecture et le diagnostic de cet atelier, il deviendra clair que l’investissement y sera très rentable car il constitue un projet stratégique où se croisent de nombreux secteurs et est directement lié à la valeur politique et nationale que le Maroc continue de construire, non seulement pour le présent ou l’avenir proche, mais pour les générations à venir”.
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