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Les déficits jumeaux au Maroc sont-ils de retour à l’ère du Covid-19 ?

Dans un environnement national et international de propagation de la pandémie covid-19, la fermeture des territoires et l’arrêt des échanges à l’échelle mondiale ont fait couler beaucoup d’encre. En effet, selon la banque mondiale, l’économie internationale enregistrerait une contraction de 5.8% ce qui expose 1.5 milliards de personne dans le monde au chômage .Au Maroc, depuis le 20/03/2020, date de début de confinement, l’équilibre macroéconomique marocain a enregistré un retour significatif des deux déficits interne (budgétaire) et externe(commercial), ces deux déficits peuvent être qualifiés de jumeaux ?

La théorie des déficits jumeaux stipule que le déficit budgétaire financé par endettement pourrait conduire à un déficit de la balance commerciale à travers les fluctuations des taux d’intérêt et du taux de change, la figure ci-après explique le mécanisme :

L’appréciation de la monnaie nationale est une conditionsine qua non pour la validation de la théorie des déficits jumeaux (voir figure ci-dessus). Or, au Maroc, malgré la politique de libération graduelle du taux de change, ce dernier ne pourrait fluctuer que dans une fourchette de 5%. Autrement dit, le taux de change à 95% est sous contrôle ce qui inhibe tout scénario de cause à effet entre les deux déficits.

En effet, les deux déficits ont toujours coexisté, ces derniers ne peuvent pas êtrequalifiés de jumeaux malgré leurs aggravations concomitantes à cause de la pandémie covid 19  pour trois raisons principales :

Primo : le taux d’intérêt au Maroc, pratiqué par les différentes banques, ne dépend pas de la politique budgétaire, mais des orientations de la banque centrale envers les différentes banques dont le nombre forme une sorte d’oligopole (le Maroc compte moins de trente banque).

Secundo : la fluctuation du  taux de change ne dépend des mécanismes du marché que dans une proportion de 5%. Par conséquent, toute politique discrétionnaire n’engendrerait aucune appréciation significative du taux de change qui reste toujours sous le contrôle des autorités monétaires au Maroc.

Tertio : aucun lien  économique n’est confirmé entre le déficit budgétaire et commercial au Maroc. En effet, le premier déficit s’explique toujours par l’insuffisance des recettes publiques(fiscales et non fiscales) face aux dépenses de fonctionnement, de l’investissement, de la compensation et des services de la dette.Cependant, le déficit commercial au Maroc s’explique surtout par l’exportation des produits à faible valeur ajoutée (agriculture et produits faiblement industrialisés…) et l’importation des produits à haute valeur ajoutée (produit de haute technologie).

En somme, il faut rappeler que l’effet ou la théorie des déficits jumeaux a étéconstaté pour la premièreaux états unis suite aux politiques de relance keynésiennequ’aengendrée une augmentation des importations américaines. Ce scénario ne pourrait pas se produire au cas marocain à cause du rôle discrétionnaire des autorités monétaires au Maroc (taux d’intérêt et taux de change). Conséquemment, pour lutter contre les effets négatifs de la pandémie covid-19, les autorités budgétaires pourrait pratiquer une politique expansionniste (augmentation des dépenses par endettement, crédit à taux zéro…) afin d’augmenter le pouvoir d’achat des citoyens marocains, cette politique impacterait positivement le cycle commercial des différentes entreprises ce qui engendrerait en dernier ressort une reprise des activités économiques. Mais, la principale contrainte qui pourrait affaiblir les retombées positives de cette politique est le niveau des réservesen devises qui a accusé une diminution drastique à cause la pandémie covid-19.

À suivre       

(*) Professeur universitaire

Economiste-fiscaliste

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