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Jeunesse marocaine : entre émergence et responsabilité

Personne ne contesterait le fait que la jeunesse marocaine vit dans une grande confusion politique. En effet, la faible présence de jeunes au sein de la scène politique marocaine en dit long sur les bases qui constituent l’édification du système démocratique interne. L’engagement actif des jeunes représente l’un des piliers qui influence positivement le succès et la réussite du processus électoral renforçant ainsi la position des jeunes dans la prise de décision.

Cependant, la participation politique des jeunes au Maroc n’est pas tout à fait absente, elle prend tout simplement une toute autre dimension tacite. Ces jeunes là ignorent encore la valeur de l’inclusion politique au sein des instances politiques officielles pour plusieurs considérations, à commencer par la situation sociale de la propagation du chômage et le manque d’opportunités d’emploi qui peuvent les conduire à adopter les positions les plus radicales, en plus du déclin du rôle des instances de la société civile et de l’espace universitaire en termes d’encadrement des jeunes , d’établissement des valeurs de la citoyenneté et de la motivation à être créatifs, en plus du fait que le plaidoyer sur les problèmes de la jeunesse marocaine est encore confié à une génération autre que les jeunes.

Dans ce cadre, il ne faut pas oublier que les jeunes prennent position vis-à-vis à des questions d’actualité notamment sur les réseaux sociaux sans forcement adhéré à un parti politique ou un syndicat, mais encore en se manifestant sur les gradins dans les stades lors des matchs locaux. L’exemple le plus connu est celui des ultras qui ne cessent de transmettre une multitude de messages implicites à travers leurs comportements en tant que supporteurs.

On peut dire alors que le rapport des jeunes à la politique est très complexe tout comme l’a dit le martyr Omar Benjelloun: « Les jeunes en particulier ne se soucient pas du passé et de la lutte du passé, mais se soucient de sa réalité et de son avenir qu’il considère sombre. »

Cet amalgame de facteurs nous pousse à s’interroger et à poser les questions suivantes :
Comment les jeunes d’aujourd’hui peuvent faire confiance aux programmes proposés par les parties politiques en place ? Et quelles sont les facteurs qui les empêchent d’émerger sur le devant de la scène politique ?

Au Maroc, les jeunes participent dans un contexte politique différent de celui des générations précédentes. Ils comptent 38% de la population totale et représentent aussi bien un avantage qu’un défi pour le développement du pays. Pour cerner cette problématique dans ses divers aspects, il faut d’abord connaître les jeunes et détecter les mécanismes qui expliquent leurs attitudes.

La jeunesse marocaine constitue un corps hétérogène puisqu’il existe plusieurs strates sociales dans lesquelles chaque catégorie opte pour une différente forme d’action politique. Ainsi, on constate que les jeunes du milieu rural participent principalement à travers les associations.

D’autres catégories choisissent le coté religieux comme forme d’expression politique. Quant aux jeunes exclus socialement (pauvreté, délinquance, analphabétisme), ils optent parfois pour la violence pour s’exprimer. Enfin, certains jeunes s’expriment à travers la musique notamment le rap ou l’art. Ensuite, il faut tenir compte de l’évolution du rapport des jeunes à la politique. Le recours fréquent à certaines pratiques ou formes non conventionnelles de la participation (manifestation, grève, signature de pétitions, occupation de l’espace public) nécessite une attention particulière.

Toutefois, cette dernière forme d’expression montre l’étendue du fossé séparant les jeunes à la politique. Est-ce le manque de confiance envers les programmes proposés par les parties politiques ? Ou s’agit-il tout simplement d’un manque d’information et de repères politiques ? En effet, il ya lieu de remarquer que les jeunes préfèrent s’impliquer de manière implicite car cela les éloigne de toute forme de responsabilité. Le manque de confiance dans les programmes proposés par les parties politiques explique le manque d’engagement de la jeunesse marocaine dans les processus de prise de décisions publiques.

La participation de la jeunesse aux décisions qui la concernent est l’un des facteurs de succès de l’action de l’État à tous les niveaux.
Par ailleurs, donner l’opportunité aux jeunes d’être considérés comme partenaires à part entière, d’être écoutés et décisionnaires permet de renforcer leur confiance dans l’État.

L’engagement des jeunes dans la vie publique peut également avoir un impact économique à long terme. En créant des espaces pour que les jeunes puissent s’exprimer et façonner des politiques publiques reflétant leurs objectifs et ambitions, cela permettrait d’aboutir à un environnement économique encourageant davantage l’activité commerciale, l’entreprenariat des jeunes et la création d’emplois.

D’autre part, il faut souligner que les jeunes d’aujourd’hui font fasse à plusieurs obstacles les empêchant d’émerger sur le devant de la scène politique. Certains estiment que les jeunes ne sont pas assez responsable et ne peuvent pas bénéficier d’un statut d’adulte et ne méritent pas les privilèges associés, d’où la non reconnaissance de la jeunesse en tant que catégorie sociale politiquement responsable. Ensuite, vient le coté institutionnel notamment liés à la méthode de renouvellement et de récompense des élites politiques. La responsabilité politique est une récompense pour les plus engagés et les plus anciens, ce qui engendre une désillusion des élites politiques.

Par ailleurs, la pensée collectiviste constitue aussi une véritable menace pour l’épanouissement social et politique des jeunes. L’individu citoyen est souvent sacrifié au profit de groupe/ institution, ce qui limite sa liberté et par conséquent il renonce à tout type d’initiative. Or, il ne faut pas oublier le facteurs religieux qui reste liés à une certaine interprétation limitée de l’islam qui exclut les jeunes en général et les femmes en particulier sous prétexte de non mixité en islam qui oblige les femmes à s’exclure de la sphère publique (masculine).

Le Maroc doit donc impliquer les jeunes dans l’action politique à travers une approche participative dont la responsabilité incombe à tous: famille, université, partis, institutions publiques et organisations de la société civile, et créer une ambition politique parmi les jeunes en changement, dans la prise de décision et dans la prise de responsabilité, comme le dit Abdullah Al-Arwi « Quiconque ne se soucie pas de la politique ne peut pas être un citoyen, mais plutôt une personne passive qui ne demande qu’à l’État de faire des choses qu’il ne peut pas faire. »

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