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La coexistence intégrative, la clef de la souffrance de l’humanité

La coexistence intégrative est un concept récent totalement différent de la coexistence tout court.

La coexistence que réclament certains mouvements intellectuels ou religieux n’est pas différente de la tolérance. La réalisation de cette dernière, que je qualifie de coexistence partielle, est malheureusement en échec au niveau national et mondial. L’échec étant dû à son caractère partiel et « hypocrite »,  malgré des efforts qui évoluent depuis des centaines d’années. Or c’est peut-être la raison pour laquelle la coexistence religieuse n’arrive pas à voir le jour. En effet comment un chrétien qui ne croit pas à l’islam, un juif qui ne croit ni au christianisme ni à l’islam, comment un baha’i dont la religion n’est pas reconnue, peuvent coexister avec tous ces préjugés ? Comment un rifain qui  se croit différent des arabes, un sahraoui qui est  méprisé pour sa couleur, un fassi qui se voit supérieur aux autres, un bédouin qui est méprisé par les citadins, peuvent coexister avec tous ces préjugés ? C’est d’ailleurs cela qui m’amène à qualifier de « jeux de rôles de la tolérance » toutes les réunions œcuméniques des religions et des cultures car chacun des acteurs est conscient de ses propres jugements et de ceux des autres. C’est malheureusement une forme d’hypocrisie moderne et civilisée.

  1. La tolérance fait appel à l’intellect

La tolérance ou coexistence partielle est totalement différente de la coexistence intégrative. La tolérance est une forme de respect, une sorte de traité de paix  sans aucune notion d’amour et d’appartenance collective à un seul  et unique groupe, que ce soit à l’échelle locale, nationale ou mondiale. Nous pouvons considérer  la tolérance comme une forme de la coexistence partielle faisant appel à l’intellect et à la raison. Dans la tolérance ou la coexistence partielle nous gardons nos préjugés vis-à-vis de ceux qui sont différents de nous, mais nous nous efforçons  de ne pas les révéler et d’exprimer du respect à l’autre. Bien sûr cette opération en elle-même est déjà complexe et difficile à réaliser.

L’exemple type de la tolérance ou  coexistence partielle est celui de la voie publique que nous acceptons  de  partager et où en principe nous tolérons tout le monde,  même  les animaux. Nous pratiquons donc  la tolérance par nécessité, en revanche à la moindre friction, les disputes et la violence se  déclenchent et  cela peut même aboutir parfois à des meurtres.

  • La coexistence intégrative fait appel aux valeurs spirituelles universelles

La coexistence intégrative fait appel à toutes les formes de la spiritualité universelle. Elle est le vécu et le partage sincère de toutes nos richesses religieuses, culturelles, intellectuelles, industrielles, matérielles, humaines, scientifiques, affectives, culinaires, littéraires, philosophiques, artistiques, éducatives et traditionnelles. Enfin, tout appartient à nous tous et nous  le partageons sans aucun préjugé et avec un énorme détachement. Cette opération est beaucoup plus complexe et nécessite un effort personnel et collectif à la fois psychique et spirituel en essayant d’apprendre à « être » dans la systémie sociale.

L’exemple type de l’apprentissage de cette coexistence intégrative est la famille. Malgré la diversité de ses membres, la famille appartient à chacun d’eux  ainsi que tous les espaces du foyer. Ce type de coexistence intégrative familiale systémique est obtenu après un apprentissage collectif et individuel en s’efforçant d’entretenir  l’unité dans la diversité.

Vouloir réaliser seulement la coexistence religieuse, est une aventure vouée à l’échec car cette coexistence est partielle et fragmentaire d’autant plus qu’il existe plus de 2300 groupes selon l’Encyclopedia of American Religions,  9e édition  parue à la fin de l’année 2016.

C’est la raison pour laquelle nous devons intégrer la coexistence religieuse dans une coexistence intégrative systémique, et c’est la seule option qui nous permettrait l’unité dans la diversité, la prospérité et la paix sociale.

Docteur Jaouad MABROUKI, Psychiatre, Chercheur, Expert en psychanalyse de la société marocaine et arabe

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